Tunis - A la une

Un gouvernement incompétent et fier de l'être '


Je ne comprends toujours pas pourquoi la présidence du gouvernement a tenu, la semaine dernière, à nous rappeler son incompétence. Contre toute attente, elle a publié jeudi dernier quatre cartons sous le titre fanfaron de rappel (j'ai opté pour une traduction personnelle, compte tenu des imperfections de la version française). Ces cartons énuméraient les supposées réalisations du gouvernement Ahmed Hachani durant les derniers mois. Compte tenu des coquilles, des approximations et de la mauvaise foi dont regorgent ces cartons, la présidence de gouvernement s'est mis le doigt dans l''il en voulant faire une communication fallacieuse et une propagande primaire. Bref, elle aurait mieux fait de se taire.
En théorie, la présidence du gouvernement dispose d'un nombre suffisant de personnel, un peu trop si on croit le discours officiel, pour ne pas laisser passer des coquilles dans les textes officiels destinés au grand public. La présence de plusieurs coquilles dans les cartons de la présidence du gouvernement, aussi bien dans la version arabe que dans la version française, s'expliquerait ou bien par la nonchalance et le relâchement général au sein de l'administration publique, ou bien par le manque de respect envers le destinataire qui n'est autre que l'opinion publique tunisienne.
Suis-je excessif ' Un peu je l'avoue, d'autant plus que nous avons un précédent et non des moindres. Rappelons-nous que la première version publiée de la constitution de 2022 était truffée de pas moins de quarante-six coquilles ce qui a nécessité une deuxième version corrigée. Le président de la République que tous soupçonnent d'être le seul auteur de la constitution, s'est trouvé dans l'obligation de s'adresser aux Tunisiens pour leur annoncer que des fautes « se sont faufilées dans le texte initial ».
Dans les cartons publiés par la présidence du gouvernement, beaucoup de chiffres ont été avancés pour nous convaincre de l'amélioration de la situation économique, sociale et financière du pays. Il serait improductif d'entrer dans les détails de ces chiffres qui sont contestés par plusieurs spécialistes ou qui trouvent leur explication dans des pratiques et des politiques peu concordantes avec la bonne gouvernance. Mais il serait intéressant de s'interroger pourquoi dans ce cas, si toutes ces réalisations sont réelles, les Tunisiens ne ressentent toujours pas la moindre amélioration de leur quotidien '
D'un autre côté, si la présidence du gouvernement veut jouer la carte de la transparence, pourquoi a-t-elle dans ce cas occulté des chiffres aussi importants que le taux de chômage parmi les jeunes qui a atteint 40% ou le taux de croissance qui n'a pas dépassé 0.4%. Ces deux chiffres alarmants font eux aussi partie des « réalisations » du gouvernement Ahmed Hachani. Seulement dans la Tunisie « juilletiste », quand un indicateur ne cadre pas avec le discours officiel à l'eau de rose, on l'efface. Mieux encore, on dégomme avec celui qui a osé alerter sur cet indicateur. Le directeur général de l'Institut national des statistiques, INS, a été limogé à la fin de la semaine dernière et remplacé par un nouveau directeur général. Comme à son habitude, la communication officielle n'indique pas les raisons de ce limogeage mais la coïncidence de la publication par l'INS d'indicateurs alarmants avec la publication des cartons de la présidence du gouvernement en dit long sur les raisons de cette décision.

Après, pour couronner le tout, ces cartons nous racontent que « les libertés, notamment publiques, sont plus que jamais garanties ». une couleuvre de plus que nous étions censés avaler si n'étaient les opposants politiques qui croupissent en prison sans jugement depuis plus de treize mois, les journalistes, les avocats et les activistes de la société civile qui sont harcelés et poursuivis en justice par le décret liberticide numéro 54.
Aux dernières nouvelles, la garde à vue de notre collègue Mohamed Boughalleb a été prolongée jusqu'à mercredi prochain.
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